Union Is Strength

20.07.2022

Crise des réfugiés en Grèce: l'Europe est vue comme une «terre promise» par les exilés qui vivent dans les centres d'accueil

Le centre d'hébergement des Thermopyles a accueilli quelque 9.000 migrants depuis son ouverture en 2016. Des familles qui espèrent, pour la majorité d'entre elles, que la Grèce ne sera qu'une étape de leur long périple.

Margaux Liagre (FR) / Asimina Doumanis (EL) - Traduit par Voxeurop

English version / Ελληνική έκδοση

Le personnel éducatif du centre des Thermopyles, en Gèce, a mis en place une activité créative pour les enfants
Le personnel éducatif du centre des Thermopyles, en Gèce, a mis en place une activité créative pour les enfants. | Omar Kassem

Aux Thermopyles (Grèce)

C'est au cœur de la Grèce-Centrale, que se trouve, en bordure de lotissements touristiques, le centre d'hébergement de réfugiés et de migrants des Thermopyles. Inaugurée en février 2016, ouverte en continu depuis six ans et demi, cette structure située près de l'autoroute Athènes-Lamía a été aménagée dans d'anciens hôtels jouxtant les eaux thermales de la région. Un projet mis en place dans le cadre du Fonds asile, migration et intégration (FAMI), financé par l'Union européenne (UE) et élaboré pour régler les problèmes liés aux réfugiés et migrants.

Créé en 2014, le FAMI a été renouvelé pour la période 2021 à 2027. Selon l'Union européenne, son financement s'est élevé à 3,137 milliards d'euros pour les sept premières années de sa mise en place. Il permet de traiter, entre autres, des procédures d'approbation des demandes d'asile, de la circulation des réfugiés et migrants au sein de l'Union européenne et de leurs conditions de séjour dans les pays d'accueil.

Depuis l'ouverture du centre d'accueil des Thermopyles, quelque 9.000 migrants y sont passés
Depuis l'ouverture du centre d'accueil des Thermopyles, quelque 9.000 migrants y sont passés. | Omar Kassem

Depuis que la structure située aux Thermopyles a commencé à fonctionner, ce sont plus de 9.000 réfugiés et migrants qui y sont passés. L'hébergement étant temporaire, les exilés s'y installent le temps d'obtenir une réponse à leur demande d'asile. Ensuite, la majorité d'entre eux émettent le souhait de partir pour un autre pays européen.

Cependant, la fermeture des frontières de nombreux pays du continent a rendu leur déplacement difficile et a piégé nombre d'entre eux en Grèce. Giorgos Palamiotis, bénévole de la structure, a vécu leur quotidien de l'intérieur, mais aussi l'évolution du centre en une structure durable pour les personnes qui y vivent.

L'importante arrivée de réfugiés des années 2015-2016 a obligé la région de la Grèce-Centrale à faire appel à des bénévoles comme Giorgos Palamiotis pour trouver des solutions, mettre en place des structures d'hébergement et essayer de créer les conditions d'hébergement appropriées «ex nihilo, sans l'aide de personne», explique-t-il.

Afin d'assurer la coordination générale de la structure, il est en contact avec des ONG, des organisations transnationales, des organismes de la société civile, les ministères grecs, ainsi qu'avec des organismes étrangers. Parallèlement, il garde la tutelle sur le secteur médicosocial.

Un manque de financement substantiel

Mais comme le confie Giorgos Palamiotis, certains financements substantiels nécessaires au fonctionnement de la structure ne sont jamais arrivés: «Il n'y a pas eu de financement des programmes communautaires, sauf en 2019, où un versement de 800.000 euros à la région dans le cadre du programme de dépenses publiques a permis de rénover certains équipements du bâtiment. Mais cet argent couvre aussi certaines obligations quotidiennes.»

Aucun autre fonds n'a été alloué, «sauf ceux octroyés par l'intermédiaire du Haut Commissariat aux réfugiés (UNHCR) auquel nous avons soumis des demandes supplémentaires, car il avait la possibilité d'un soutien technique du centre sur la base des accords existants avec l'Union européenne et le ministère des Migrations».

Dans la première période de fonctionnement de la structure, alors que les flux de réfugiés étaient nombreux et qu'il était difficile de maîtriser ce problème humanitaire sans précédent, un financement de l'Union européenne s'est avéré nécessaire: sans cette aide, impossible d'ouvrir de tels centres sur l'ensemble du territoire grec. Mais c'est avant tout grâce aux organismes publics grecs, notamment aux collectivités locales, que la politique de gestion coopérative de l'UE a pu aboutir.

Le montant des subventions n'est cependant pas établi en fonction du nombre des arrivées. Car, comme le précise Giorgos Palamiotis, «si le flux est faible, comme il l'est actuellement, il va sans dire que le gouvernement grec peut se débrouiller avec un système resserré et sans dépenses excessives».

Des douches, mais aussi des soignants et des psychologues

Aux Thermopyles, le centre s'étale sur le site de deux anciens hôtels. Dans l'un d'entre eux, chacune des cinquante chambres dispose d'une salle de bain. Dans l'autre bâtiment, un peu plus ancien, on trouvait déjà auparavant des douches communes, rénovées pour une meilleure qualité de vie grâce aux investissements réalisés par la région.

Des cantines et cuisines ont également été montées et des chauffe-eaux solaires ont été ajoutés. Et dans le même temps, des services de sécurité, d'éducation et de soins psychosociaux et médicaux ont été mis en place.

Le centre d'hébergement est témoin des destins de milliers de personnes
Le centre d'hébergement est témoin des destins de milliers de personnes. | Omar Kassem

Parallèlement à la rénovation du bâtiment, des secteurs clés de la structure ont été améliorés, comme la mise à disposition de médiateurs, de personnel médical et infirmier, de spécialistes des sciences sociales tels que des travailleurs sociaux et des psychologues. L'accès aux établissements de soin a aussi été facilité. Le personnel éducatif a quant à lui mis en place une activité créative pour les enfants, dans le cadre du programme éducatif informel organisé sur place.

S'exiler pour offrir une vie à ses enfants

Le centre d'hébergement est témoin des destins de milliers de personnes, comme ceux des familles parfois arrivées en Grèce depuis la Syrie en passant par la Turquie, après avoir embarqué sur un bateau vers la «terre promise».

M. Omar vit en Grèce depuis trente-deux ans avec sa famille. Originaire d'Alep, en Syrie, il offre ses services en tant qu'interprète et traducteur pour les réfugiés depuis le début de la crise. Parlant couramment le grec et l'arabe, il peut s'entretenir directement avec les exilés, dont il connaît mieux que quiconque les souffrances et les efforts pour prendre un nouveau départ. Une nouvelle vie, surtout pour leurs enfants, qui sont souvent leur priorité: «Nous préférons mille fois aller vivre ailleurs, pour peut-être trouver un meilleur avenir à nos enfants.»

Lorsque les frontières des pays d'Europe étaient ouvertes, la Grèce n'était qu'un point de passage vers un autre pays européen. «Maintenant, les choses ont changé. En Europe, seuls les réfugiés ayant droit à l'asile dans un autre pays peuvent circuler.» Mais les démarches administratives sont un obstacle majeur et le temps d'attente avant que soit ou non octroyé l'asile peut atteindre deux ans.

La plupart des réfugiés souhaitent quitter le pays: selon M. Omar, «99% ne veulent pas rester [en Grèce]». Mais peu veulent retourner dans leur pays d'origine, et particulièrement les réfugiés syriens. M. Omar se souvient de la Syrie avant que la guerre n'éclate, d'un beau pays où les gens vivaient libres et sans peur et où l'indépendance économique leur permettait de vivre confortablement. Ce n'est, selon lui, plus le cas aujourd'hui. Et l'espoir de ces milliers de réfugiés est de recommencer une nouvelle vie, ailleurs.

Union européenneCet article est réalisé dans le cadre du concours Union Is Strength, organisé par Slate.fr avec le soutien financier de l'Union européenne. L'article reflète le point de vue de son autrice et la Commission européenne ne peut être tenue responsable de son contenu ou usage.